DDMRP est parfois présenté comme une révolution qui soigne tous les maux de nos chaînes d’approvisionnement. Mettez en œuvre DDMRP et vos taux de services vont monter en flèche, vos stocks vont baisser, vos coûts seront réduits et vos équipes opérationnelles vont retrouver la sérénité.
Hum. J’en vois qui sont sceptiques.
Rassurez vous : même si vous sautez le pas de la transition « Demand Driven », la loi de Murphy va continuer de frapper !
Oui, vous allez continuer à subir des retards de fournisseurs, des pannes machines, des catastrophes qualité, des problèmes de données, des lancements de nouveaux produits en retard… Bref toutes ces petites joies qui pimentent la vie des responsables industriels.
Il n’y a pas de secret : les supply chains d’aujourd’hui sont toujours plus complexes, avec de multiples interactions et une prolifération de produits. Cette complexité croissante ne fait qu’augmenter en permanence le nombre d’opportunités de problèmes, et donc les risques.
Plus ça ira, plus il y aura de risques dans nos supply chains. La question est : comment en limiter l’impact ?
On a cru souvent que la technologie informatique permettrait de résoudre l’équation. Il suffit de gagner en visibilité sur l’ensemble de la chaîne et de tout synchroniser en interconnectant tous les acteurs. Malheureusement cette approche ne fait qu’amplifier la variabilité, sa propagation, et au lieu de stabiliser on crée souvent le chaos…
Bon d’accord, mais quel est l’apport de DDMRP dans la gestion des risques ?
Voyons trois apports essentiels :
- La conception d’un modèle robuste qui traite la variabilité
- La gestion claire des priorités
- La prise en compte de la nature non linéaire de nos systèmes
La conception d’un modèle robuste

La première étape de la méthodologie est de concevoir le modèle opératoire de la supply chain, en prenant en compte la variabilité.
Reprenons les fondamentaux ; on ne dispose que de trois moyens pour lutter contre la variabilité ; des buffers de stock, de délai ou de capacité.
Quelle est la dernière fois que vous avez remis à plat le modèle de vos opérations, et que vous vous êtes demandé si vous aviez les bons stocks aux bons endroits, les bons buffers de temps (des files d’attentes pilotées), et les bonnes marges de capacité sur vos équipements ? Revoyez-vous ça une fois par semestre ? Pilotez-vous vos buffers ou les subissez-vous ?
Vous avez une VSM cible ? Avez-vous intégré dans cette VSM les éléments de sécurisation de votre Supply Chain ? Les buffers de stock, de temps et de capacité qui vont permettre de la rendre résiliente ? Ou bien est-ce une VSM idéale qui ignore Murphy ?
La gestion claire des priorités

Lors d’une conférence où Unilever a présenté sa première mise en œuvre de DDMRP au Canada, le chef de projet a témoigné d’une mésaventure qui s’est produite quelques semaines après le démarrage de DDMRP. Une crise qualité majeure est survenue, provoquant le blocage de lots de matière sur toute la chaîne, des fournisseurs de l’usine aux points de vente.
Aïe. Ce n’est certainement pas ce que vous souhaitez en plein pilote DDMRP, oui mais voilà, c’est Murphy qui décide.
L’équipe s’est donc concentrée sur le suivi au quotidien des priorités rouges/jaunes/vertes – et la crise a été entièrement résolue en trois semaines, alors que dans le modèle antérieur des crises similaires avaient des répercussions pendant plusieurs mois.
Des signaux clairs qui permettent d’éviter les sur-réactions des uns et des autres et la confusion en alignant tout le monde sur le même jeu de priorités, quoi de plus logique ?
La reconnaissance de la nature non linéaire de nos opérations
Nos supply chains sont aujourd’hui composées de systèmes complexes adaptatifs qui interagissent. Chaque usine est un système complexe adaptatif, et non un système linéaire. Qu’est-ce que ça signifie en terme de gestion des risques ? Lorsqu’il y a la catastrophe de Fukushima et que des sources d’approvisionnement deviennent indisponibles, les acteurs de la supply chain s’adaptent.
Observez votre supply chain. Vos usines se reconfigurent en permanence. Vos fournisseurs changent. Les nouveaux produits lancés conduisent à de nouvelles combinatoires. Vos concurrents changent la donne. Tout évolue en permanence, sous l’effet de contraintes externes, de décisions humaines, et tout devient moins prédictible. Nous ne vivons plus dans un environnement linéaire et cartésien, et ce n’est pas près de changer.
Pour répondre à cela DDMRP nous amène à mettre en œuvre un modèle qui s’adapte de manière dynamique à l’évolution de l’environnement. On met en place des délais découplés plus courts qui permettent de réagir rapidement. On se concentre sur les points de leviers – sur la loi de pareto qui régit les systèmes adaptatifs – pour agir au bon endroit au bon moment. Donc, on crée un modèle plus agile, qui réagit bien mieux aux aléas qui surviennent dans nos opérations.
Non, DDMRP n’éradique pas Murphy – mais il donne à nos équipes les moyens de piloter un système beaucoup plus robuste !