Demand Driven – ne cherchez pas à tout régler pour (re)dimensionner vos buffers

Le modèle DDMRP repose sur l’utilisation de buffers qui s’adaptent aux changements de la demande ou de l’environnement de production. Cette adaptation vient principalement de la mise à jour à intervalles réguliers des paramètres qui régissent la taille des buffers.

Cependant, derrière chaque buffer se cachent plusieurs paramètres à régler en même temps ; tels que les facteurs de délai ou de variabilité par exemple.

Lorsque vous souhaitez mettre en place un modèle opératoire DDOM ou le mettre à jour dans le processus DDS&OP, est-il nécessaire de régler en même temps tous ces paramètres ?

Les performances sont-elles les mêmes voire sont-elles meilleures si certains paramètres sont définis comme « fixes » ?

Cela soulève un certain nombre de questions industrielles et scientifiques ; traitées dans le travail de doctorat de Guillaume Martin soutenu en novembre 2020 «  Contrôle dynamique du Demand Driven Sales and Operations Planning » réalisé dans le cadre du laboratoire commun de recherche AGIRE.

Quels sont les problèmes rencontrés ?

Pris indépendamment, chaque buffer est dimensionné par un jeu d’au moins 5 paramètres ;

  • la Consommation Moyenne Journalière (CMJ),
  • le délai découplé (DLT),
  • le facteur de Lead Time (LTF),
  • le facteur de variabilité (VF)
  • et l’horizon de détection des pics (pour son intégration dans l’équation de flux).

La définition de ces paramètres est décrite dans les grandes lignes par le Demand Driven Institute (DDI), mais pas nécessairement les règles permettant de les faire évoluer dans le temps.

Pris dans leur ensemble, il faut aussi prendre en compte les effets de modifications de paramètres de buffers sur l’ensemble du système ; avec beaucoup plus de sécurité, ma référence va certainement être livrée à l’heure mais pour quel « coût » pour les autres références ?

Enfin, du point de vue du gestionnaire, il est parfois humainement infaisable de mettre à jour facilement et rapidement plusieurs centaines de buffers.

Travaux menés pour répondre à ces problèmes

Afin d’aider les gestionnaires dans leur décision, un plan d’expériences a été mené pour tester les différentes combinaisons de paramétrages possibles. Ces méthodes ont été extraites des formations du DDI. Des techniques utilisées dans d’autres méthodes de gestion ainsi que du retour d’expériences de projets menés par AGILEA.

Pour pouvoir tester toutes les combinaisons possibles, un outil de simulation a été développé afin d’évaluer les répercussions de modifications du paramétrage de buffers sur l’ensemble de l’organisation.

Conclusions de l’étude 

Les résultats de l’étude sont synthétisés dans un arbre de décision pour aiguiller le décideur (Figure 1).

Les deux paramètres les plus impactants sont (logiquement) le DLT et la CMJ. L’arbre synthétique reprend uniquement les décisions affectant ces paramètres.

Figure 1: arbre synthétique de décision et recommandations

Deux grandes catégories se détachent pour choisir la politique à appliquer et pour mettre à jour les paramètres ; le produit stocké a-t-il un profil de saisonnalité ou non ?

Dans un second temps, l’utilisateur peut choisir sa méthode de mise à jour selon le critère de performance qui est le plus pertinent pour lui :

  • la maximisation du taux de service client,
  • la minimisation des stocks et des en-cours,
  • la minimisation du temps de parcours,
  • ou la minimisation de la charge sur le goulot.

Dans de nombreux cas, les politiques de paramétrage les plus efficaces se trouvent être contre-intuitives :

  • Garder les paramètres constants au lieu de les faire varier tout le temps permet d’être réactif mais pas trop. Car une trop grande réactivité peut rendre le système instable (et avoir l’effet inverse de celui escompté),
  • Il est parfois plus intéressant de contrôler la taille des buffers en faisant varier le DLT plutôt que la CMJ. Notamment grâce à une politique appelée « DLT unique », qui propose de donner une seule valeur de DLT à tous les produits d’un étage de buffers.

En conclusion, avant de vouloir dimensionner ou redimensionner vos buffers, il est nécessaire d’identifier quels sont réellement les paramètres important à revoir. Cela dépend essentiellement du type de demande ainsi que de l’objectif de performance recherché.

Le travail réalisé a ainsi permis de dégager 8 typologies de combinaisons pertinentes pour le paramétrage des buffers en fonction des différentes situations étudiées. Pour plus de détails, vous pouvez accéder au manuscrit de thèse.

Bien sûr ces travaux ouvrent un grand nombre de perspectives. L’une d’elle consisterait à l’industrialisation d’un outil complet préconisant automatiquement le type de paramètres à modifier selon la nature de l’organisation évaluée (demande, saisonnalité, etc.).

Auteurs : Romain Miclo & Guillaume Martin